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Après la discussion que Noah avait eu avec Joyce dans la chambre de cette dernière l'après-midi même, il s'était lancé le pari de la convaincre qu'il était aventurier. Certes, il n'en était pas persuadé un seul instant mais le jeu se trouverait donc là. Lui faire croire quelque chose en laquelle lui-même ne croyait pas le moins du monde. Certains pourraient penser qu'il avait l'esprit bien tordu d'agir ainsi, mais cela amusait le néo-zélandais. Un peu d'action ne lui ferait pas de mal dès son arrivée. C'était un défi lancé à lui-même autant qu'à Joyce, il serait forcé de tester ses capacités d'adaptations. Cette phrase peut sembler bien obscure si l'on ne connait pas le garçon en question, mais Noah fait une fixation sur le fait de rendre les gens qui l'entourent heureux, et pour se faire, il imagine qu'il doit agir comme ils l'attendent. Il ne peut concevoir le fait d'être apprécié à sa juste valeur. Oh bien sûr, quelques fois il agit comme bon lui semble en s'imaginant que telle ou telle action permettrait à telle personne de s'épanouir, mais c'était bien rare. Tant et si bien qu'il vivait désormais dans la peau d'un personnage, un benêt joyeux qui faisait sourire son entourage par ses blagues qui n'étaient pas marrantes. Il pensait que ceux qu'il croiserait se sentiraient valorisés par l'idiotie et l'esprit peu fin de cet individu inventé de toutes pièces, et au fond, cela avait plus ou moins marché. Bien entendu, pas toujours, mais la plupart du temps. Et c'était les personnes qui n'entraient pas dans la case "satisfait par le benêt" qui l'inquiétaient, car en leur présence, il paniquait. Noah ne savait plus comment réagir, et il espérait que cette entorse au règlement à travers leur excursion nocturne lui permettrait d'apprendre quoi faire. Joyce serait en quelque sorte son cobaye, même si cette idée le répugnait. Il n'était pas manipulateur pour un sou, pourtant il jouait en quelques sortes avec les gens. Mais à trop faire semblant, ne perdait-on pas la notion de qui on était vraiment ? Même si cette idée l'effrayait, le brun ne pouvait s'empêcher de continuer.

Ils avaient rendez-vous à minuit, devant l'académie, et il avait été à l'heure. Le néo-zélandais ne supportait pas d'être en retard, sans bien savoir pourquoi et quelle que soit la situation. Devant l'académie signifiait dans le parc, cependant l'amusement ne se trouverait pas là. Les deux gais lurons pouvaient tout aussi bien s'y rendre en plein jour et la situation serait parfaitement similaire. Noah avait besoin de plus, beaucoup plus pour réussir son pari. Et la réponse s'était imposé à lui-même dans la première partie de la nuit: Helsinki. Dans la vaste capitale, le monde s'offrirait à eux. Un terrain de jeu grandeur nature où le monde nocturne urbain serait à leur portée. Ils n'auraient que peu de terrain à traverser avant de se retrouver sur la route, et que peu de route à faire avant de se retrouver en ville. En centre-ville.

Désormais, l'élève attendait sa camarade. Elle ne devait pas tarder, il avait un petit peu d'avance après tout, resterait juste à savoir ce qu'elle penserait de son idée. Mieux valait qu'elle ne prenne pas ses jambes à son cou pour que Noah puisse faire ses preuves, mais il était possible qu'elle soit effrayée à cette virée dans une ville inconnue en pleine ville ...

Spoiler:

Joyce c'était couché tôt ce soir. Attendant patiemment et avec excitation la petite excursion que Noah aurait avec elle. Elle programma un système de réveil assez bizarre avec son ordinateur. Elle était assez doué avec les ordinateurs, en tout cas assez pour arriver à pirater le système de son ancienne école. Bien sûr, elle ne se servait pas de ce "talent" pour changer ses notes, elle en aurait eu aucun intérêt. Mais elle trouvait ça assez amusant. Le réveil qu'elle avait programmé était fait de telle sorte qu'il ne réveille pas sa camarade.

En même temps Joyce a le sommeil léger, rien qu'un petit bruit la réveil. Elle mit donc sa chanson préférée en sonnerie. Et à 11h30, elle se réveilla en attendant :

Hey Jude, don't make it bad.
Take a sad song and make it better.
Remember to let her into your heart,
Then you can start to make it better.

Vous l'aurez deviné, Hey Jude des Beatles, est actuellement sa chanson préféré. Et ceci depuis deux ans, date à la quelle, Joyce a découvert cette chanson. Elle est raide dingue de ce groupe. C'est son "groupe de l'année". Fut un temps c'était son groupe coup de cœur, mais elle a découvert d'autres groupe, comme : The Brendan Hines & co. ou le cast de la série Glee.

Elle se prépara et prit son IPod vert, avec toutes ses chansons préférées. Pourquoi ? Parce que la vie est plus fun en musique. Elle espéra juste que Noah sera du même avis. Il était à présent 11h55.

Joyce descendit les escaliers dans le plus grand silence. Elle avait un peu peur de se faire prendre et aussi du fait qu'il fasse nuit noir et qu'il n'y ai aucun bruit. Et puis elle avait rien pour se défendre. Elle sortit dehors, il faisait assez froid, c'était normal, en Finlande il fait pas 25° la nuit.

Elle vit que Noah était déjà là. Il était assez ponctuel apparemment. Joyce quant à elle détestait être en retard, et aujourd'hui, enfin ce soir, elle arriva pile à l'heure. Espérons juste que Noah ne sera pas trop "énervé" de l'avoir attendu.

- Salut. J'espère que je ne t'ai pas trop fait attendre ?

Noah, lui, n'avait pas du tout dormi avant de venir. Les nuits blanches à traîner dans Auckland avec ses potes avaient été sa plus grande passion pendant les derniers mois. Ainsi il pensait - peut-être à tort - qu'il pourrait supporter sans problèmes cet enchaînement d'heures d'éveil. Et puis après tout, les cours n'avaient pas encore commencé, il n'aurait donc aucun souci s'il s'endormait soudainement dans la journée du lendemain. Pendant encore près d'une semaine, il était libre de faire ce que bon lui semblait sans conséquence sur son travail scolaire, et il ne comptait pas s'en priver. Il avait déjà prévu de fouiller l'école afin d'en connaître les moindres recoins et de pouvoir s'y diriger les yeux fermés (ou en pleine nuit, si l'occasion s'en présentait une nouvelle fois, ce qui ne serait pas difficile). Quoi qu'il avait réussi à gagner la sortie des lieux sans grande difficulté dès le premier jour, il n'aurait pas réellement besoin de plus pour l'instant.

Il ne faisait pas très froid cette nuit là, ou du moins il s'était suffisamment habillé pour l'occasion. La veste en cuir marron qu'il portait déjà depuis quelque temps faisait parfaitement l'affaire, même si la lumière de la lune ne permettait pas d'en distinguer autre chose que la forme générale. Elle était un peu vieille certes, mais il y était bien trop attaché pour la jeter, ou du moins la remplacer. Noah avait tendance à s'attacher bien trop vite et à bien trop d'objets divers et variés. Comme cette veste en cuir par exemple, ou comme son vieux mp3 dont l'écran n'émettait plus qu'une très faible lueur à force d'avoir été utilisé des heures durant et d'être tombé un peu trop souvent. Ce genre d'objets qui faisaient partie de votre quotidien peu de temps après les avoir obtenus et qui en devenaient un morceau de vous-même. Ce qui pourrait sembler anodin pour d'autres mais qui vous rappelaient tant de choses en un simple coup d'œil. Et cela pouvait en devenir triste quand on y réfléchissait: lorsque tel objet était définitivement bon pour la poubelle, vous étiez forcé de vous en débarrasser, et certains de vos souvenirs avec malheureusement, c'était inévitable. Créer un cimetière pour ordures n'était pas la chose à faire. Voilà pourquoi les vieilles personnes avaient toujours des centaines d'objets inutiles, pour ne pas oublier.

Joyce arriva enfin, même si "enfin" n'était pas le bon terme. En effet elle n'était pas en retard, et un clocher au loin sonnait les douze coups de minuit. A Helsinki sûrement. Leur destination. C'était assez effrayant en réalité, se savoir dehors à l'heure du crime, dans un lieu inconnu et en compagnie d'une personne tout aussi perdue que vous. Mais excitant aussi, on se sentait comme invincible. Comme si le fait de braver l'interdit nous rendait surhumain.


▬ Non, ne t'inquiète pas. Et puis t'es pile à l'heure alors je serais un sacré connard si je t'en voulais.

Certaines personnes étaient gênées par le fait d'appeler un chat un chat. Mais Noah ne comptait pas envelopper les choses en utilisant des mots tels que "goujat" ou "malotru". Il n'aimait pas mâcher ses mots, et cela pouvait sembler paradoxal avec son attitude de gentil petit Caliméro qui souhaitait être apprécié de tous.


▬ Bon, pour te prouver que je suis un aventurier, je n'sais pas trop comment faire, je ne sais même pas ce que tu entends par "aventurier".

En garçon pseudo-sage et ordonné, Noah revenait à cette histoire de pari, qui après tout était la raison de leur sortie à une telle heure. Il ne comptait pas dire leur destination à la demoiselle, c'était ce qui rendrait l'aventure intéressante. Observer ses réactions, sa peur peut-être, guetter le moindre tressaillement. Cela faisait un peu tueur en série dit de cette façon, mais c'était ce qui attendait le jeune homme.


▬ On y va ?

Et sans même attendre la réponse de son acolyte, il commença à se diriger vers la route. Peut-être avait il peur que Joyce change d'avis, lui même n'en savait rien. Mais le fait était que plus tôt ils partiraient, plus de temps ils auraient pour vagabonder clandestinement. Et plus cela serait amusant aux yeux du garçon d'Auckland.

Quand Noah lui dit qu’il serait un connard, si il lui en voulait. Cela la fit un peu rire. C’était tout à fait le genre de phrase qu’elle aurait sorti en temps normal. A croire qu’il lui ressemblait un peu. Ou alors qu’elle commençait à déteindre sur lui. Si c’était ça, qu’est ce que ça serait après deux semaines à se voir. Il serait son jumeaux ! Espérons que non, et puis avoir quelqu’un qui vous ressemble, ce n’est pas très gai. Tout comme quelqu’un qui essaye de faire votre bonheur, c’est ce qui énerve le plus Joyce. Elle préfère avoir quelqu’un qui la traine dans la boue, plutôt que quelqu’un qui lui ressemble ou qui dû moins essaye de faire son bonheur. Ou d’être la personne parfaite, celle dont on a toujours rêvé. Et puis même si c’est le cas de Noah, il n’arrivera jamais à être «l’homme idéal» puisque Joyce n’a pas d’idéal et même si elle en a un, personne ne saura jamais qui c’est.

Joyce préfère que Noah soit un bouffon de première, plutôt que quelqu’un qui essaye de lui plaire. Elle n’aime pas l’artificiel, elle le veut au naturel, sans tous ces trucs pour plaire aux gens. Elle commence à deviner petit à petit qu’il n’est pas celui qu’il y paraît. Même si ça ne fait que très peu de temps qu’il se connaisse, elle commence à voir qu’il n’est qu’un bon comédien. Et elle a bien une petite idée derrière la tête, pour qu’il lui montre vraiment qui il est.

- J’ai bien une petite idée. Premier point, un aventurier est honnête. Alors, il faut que tu sois honnête et sans artifices, en gros être toi même. Comme moi je fais en fait. Ne pas avoir peur des autres et leur prouver qu’on n’a pas honte de qui on est. Et deuxième point être aventurier, ce n’est pas arriver à boire de l’alcool jusqu’à en mourir, ou faire des trucs dangereux. Mais c’est plutôt savoir dire non ! C’est pour moi être aventurier, bah oui on l’ai bien plus quand on dit non, qu’on est pas pareil, plutôt que de fumer ou boire comme tout le monde.

On se croirait dans un rendez-vous chez son psy. Mais c’est ça sa technique. Voir les vrais personnes, et tout ça en leur parlant de phénomène de société ou de choses de la vie. Espérons juste que le vrai Noah ne soit pas quelqu’un qui fait comme tout le monde. Parce que ce serais tout le contraire de Joyce. La preuve, ce soir, elle est habillé en noir mais elle a un bonnet multicolore. Ce n’est pas très discret mais c’est elle.

Noah lui demanda si il partait maintenant et puis sans même attendre sa réponse il partit. Elle lui emboita le pas, sans rien dire. Ils n’allaient pas couché là quand même. Et puis, Joyce ne savait pas ou il l’emmenait. Elle était très excité, mais en même temps apeuré et en même temps elle a peur d’avoir fait de la peine à Noah. Tout ça en même temps !

Noah pensait pouvoir mettre à l'épreuve ses capacités d'improvisation et d'adaptation grâce à Joyce, et à vrai dire il allait être servi. Elle l'avait à peine rejoint qu'elle avait lancé une tirade que l'on pourrait presque qualifier de "piège". En effet, la blonde venait de lancer qu'un aventurier ne devait pas avoir peur d'être lui-même ainsi que toute une suite de paroles de ce genre. Le brun y répondit par un fin sourire, qu'elle ne pourrait pas distinguer dans le peu de lumière ambiant. Si elle savait. Mais à vrai dire, peut-être savait elle déjà, ce qui pourrait se montrer beaucoup plus embêtant. La coïncidence était vraiment étrange. Le fait qu'elle évoque l'idée de s'assumer plutôt que d'être un clone des autres membres de la population et le fait qu'il voit cette escapade comme un test grandeur nature à propos de toute sa manière de vivre quasi-malsaine ne pouvaient tout simplement pas entrer en contact par hasard. Cela semblait bien trop énorme. Ainsi, à son sourire succéda un froncement de sourcil de la part de Noah, tout aussi indiscernable de la part de celle qui l'accompagnait.

Il ne savait pas vraiment quoi répondre sans avoir l'impression de se vendre. La dernière chose au monde qu'il désirait faire bien entendu. Alors il continua de marcher silencieusement dans le noir. Désormais, il venait d'arriver sur la route qui les mènerait jusqu'à Helsinki. Il ne faudrait que très peu de temps avant que sa compagne comprenne où ils se rendaient, c'était maintenant bel et bien évident. Le goudron sous leurs pieds était dur et ce serpent noir qui slalomait entre les bâtiments et le peu de végétation qui se trouvait encore là leur permettait de se repérer aisément, étant la seule chose aussi sombre dans la lumière de l'astre lunaire.


▬ Et admettons que tu rencontres un type qui a tué quelqu'un. Tu le trouverais aventurier s'il assumait ce qu'il avait fait, qui il était, ou tu préfèrerais qu'il ne t'ai jamais rien dit ?

C'était peut-être idiot de lui poser cette question, mais Noah voulait vraiment savoir si Joyce voyait son raisonnement jusqu'au bout lorsqu'elle en faisait part à quelqu'un. Il lui semblait, quant à lui, complétement improbable d'être toujours franc et soi-même. On choquerait forcément quelqu'un à un moment donné, que cela soit par une attitude ou une parole déplacée. Certes, la demoiselle Harley ne le gênait pas par rapport à sa franchise, mais tout le monde ne devait pas être aussi compréhensif envers elle. Et même si la comparer à un assassin comme il l'avait en quelques sortes suggéré dans ses paroles précédentes était extrêmement exagéré, il fallait à ses yeux envisager la moindre des possibilité avant d'émettre des hypothèses sur telle ou telle chose.

Il ne pensait pas mettre sa "couverture" en péril, même si le terme semblait un peu exagéré en ces conditions. Pourtant rien n'était jamais joué, cela ne tenait jamais qu'à une seule personne, et donc tout dépendait maintenant de Joyce. Peut-être ne verrait-elle rien de louche dans son attitude mais peut-être qu'au contraire serait elle désormais méfiante à son égard ... L'avenir seul le dirait.